La coupe Coupe à la pointe d’un porte billet en crocodile centré
La griffe La marque est griffée avec un film (ici argent) ou embossée à chaud
Atelier des sacs Les pièces une fois coupées et parées vont au montage
Atelier de petite maroquinerie Montage des portes monnaies avec fermoirs
La piqûre
La finition Les pièces sont teintées et cirées
Le filet
Contrôle Qualité Tous les produits sont contrôlés avant leur expédition chez le client
Stock des produits finis
Votre peau d’alligator brillante choisie… il ne reste plus qu’à la suivre dans les dédales de l’atelier afin de voir, petit à petit, se transformer votre peau précieuse en un noble produit façonné au gré de vos désirs…
La réalisation d’une pièce ressemble à la composition d’un morceau de musique… il faut tout d’abord décrypter et composer la partition avant de pouvoir la jouer… Souvent, il m’arrive d’observer au loin les chefs d’orchestre à l’œuvre (comprendre les chefs d’atelier : Albert, Dolorès, Florence), j’observe leur gestualité, leur réaction… ils sont sanguins, la musique parcourt leur corps, la pièce vit en eux !
Je les attrape au vol, mais attention il faut choisir le bon tempo, j’arrive avec seulement un dessin ou le croquis qu’un client m’a confié… ils s’imprègnent de longues minutes, de longues heures parfois, à essayer de comprendre ce que veut et ce dont le client a réellement besoin. Parfois c’est rapide et parfois je vois que je les fais souffrir avec mes idées fantasques… puis la magie opère et ils se transforment en mathématiciens, calculant les bonnes mesures pour réaliser les gabarits.
Tous ces calculs, qui paraissent si compliqués, deviennent si simples quand ils vous expliquent que chaque élément dépend d’un autre : le type de matière choisie, le type de finition, la texture finale… Leur travail à eux c’est d’être plus rapide que le temps, de gagner du temps… en fin de compte ils doivent aller plus vite que la musique…
Une fois les gabarits réalisés, la fabrication peut commencer... l’atmosphère change, on revient à l’état primaire des choses… à la matière brute…
Nous entrons dans l’atelier de lissage des peaux, les marteaux martèlent sans cesse, tirant les peaux dans tous les sens à leur maximum afin de les aplanir. La température est suffocante pour qui ne supporte pas une chaleur tropicale... les peaux sèchent dans une pièce où l’air est proche des 40°C.
Va-Sing, après 15 ans de maison, s’occupe de votre peau comme si c’était la dernière qui passait entre ses mains, toujours avec autant de passion et en silence comme pour mieux entendre ce que lui chuchote la peausserie… il lui coupe tout d’abord la tête et la queue avant d’immerger dans l’eau la peau scindée en trois.
Les peaux sont ensuite cadrées, entendez par là tirées et clouées, sur des planches de pin, vieilles de 50 ans et ornées de multiples trous que le temps et les clous, les mêmes utilisés depuis le début, laissent derrière eux. Ce sont ces mêmes trous qui nous laissent entrevoir le nombre incalculable de peaux qui ont été travaillées dans cet atelier. Les peaux passent la nuit clouées sur leur planche jusqu’au petit matin, où là une main délicate les touche afin de sentir si l’humidité présente dans la peau a pu s’évaporer… elles sont ensuite déclouées, refendues (l’épaisseur est enlevée sur toute la surface) avant d’être placées dans une cabine de séchage.
Une fois sèches, les peaux sont lissées par une pierre d’agate qui vient caresser les écailles afin de faire ressortir la brillance. Puis il ne reste plus qu’à gaufrer les écailles, la peau placée sur une plaque à haute température, se recroqueville, éliminant ainsi le reste d’humidité, ce qui permet aux écailles de gonfler.
Une fois les peaux lissées… les coupeurs s’empressent de préparer leur emporte pièce ou leur pointe, selon que la pièce est coupée à la machine ou à la main.
Peut-être, qui sait, aurez-vous le privilège d’apercevoir Va-Sing couper votre pièce, ses doigts se mettent à danser autour des gabarits, ses mains ont l’agilité d’un acrobate, la souplesse d’un gymnaste et la délicatesse d’une danseuse… Cette étape est celle que je préfère, celle qui détermine la beauté, l’homogénéité, et l’aura finale de la pièce.
Le coupeur doit visualiser la pièce, l’imaginer, la rêver… S’il a ce don en lui, tout devient magique et réalisable. Son travail n’est pas de couper simplement le cuir comme une vulgaire toile, mais au contraire le faire vivre, savoir optimiser la matière et placer chaque morceau au bon endroit comme un puzzle.
Vous savez précisément à ce moment-là si votre pièce sera à la hauteur de votre espérance.
Une fois coupés, les morceaux de cuir passent à la refente, puis à la parure (diminution de l’épaisseur sur les bords) et enfin à l’encollage (collage des doublures et des extérieurs) avant de passer dans les ateliers de montage.
Lors des opérations de montage, chaque artisan travaille de façon autonome et fabrique son produit du début à la fin. Les pièces vont être griffées, filetées et teintées avant d’être cousues, soit à la machine soit à la main. Chaque pièce est unique, il est impossible de réaliser deux pièces identiques même si vous utilisez la même matière et qu’elles sont fabriquées par le même artisan.
Avant de livrer les produits, chaque article passe par une dernière étape, celle du « bichonnage »… où l’artisan contrôle si la pièce est réalisée dans les règles de l’art et laisse ainsi dans chacune d’elles, qu’il n’a touché que quelques heures, une partie de son cœur…
Ah oui, vous vous demandez bien quel peut être mon travail… Mon travail à moi, c’est d’être marchande de rêve, je suis en quelque sorte la représentante du marchand de sable… en fin de compte ce n’est pas un travail, c’est un privilège !